Lettre ouverte à M. Jean-Michel Prêtre, Procureur de la République à Pointe-à-Pitre.

sam, 03/07/2009 - 16:41 — kalif

Pointe-à-Pitre, le vendredi 06 mars 2009.

Monsieur le Procureur de la République,

Hier soir, jeudi 5 mars 2009, de 19h30 à environ 20h45, dans une émission télévisée, diffusée sur les antennes de RFO-Guadeloupe, et consacrée à « la crise sociale » qui secoue présentement notre département, diverses personnes ont exprimé leur pensée en réponse aux questions d’un journaliste, soit, par téléphone, soit directement sur le plateau où elles étaient présentes.

Mon but, en vous écrivant, monsieur le Procureur, n’est pas de résumer l’émission que vous avez eu toute latitude de voir, soit à titre personnel, soit en tant qu’observateur républicain.

Il est d’attirer votre attention sur le comportement, et les paroles d’un des membres participants de cette réunion publique et télévisée : monsieur Elie Domota, citoyen, fonctionnaire de l’Etat, également par ailleurs, secrétaire Général d’un syndicat l’UGTG, et plus connu, depuis six semaines comme président d’un collectif syndical et associatif, dénommé en créole « Liyannaj Kont Pwofitation.

Hier soir, sur RFO-Guadeloupe, M. Domota, n’a pas seulement exposé les thèses, propositions, exigences, de ses mandants, et les siennes. Je n’ai pas pour intention de défendre, par exemple, le Medef-Guadeloupe, et les Associations et personnes qui y sont affiliées.

Je ne viens pas devant le Procureur de la République pour tâcher de le convaincre de qui a tort ou raison dans les négociations en cours, du Medef, ou du « Liyannaj », dans ce sujet des rapports économiques et sociaux si complexes, où je laisse s‘expliquer ceux qui ont mandat pour cela.

Mais je m’adresse à vous, moi, citoyen, ancien professeur de philosophie, ancien journaliste, aujourd’hui retraité, et animant un site d’information et de réflexion, Le Scrutateur, au service de la Guadeloupe, dont je suis un fils.

Je m’adresse à vous parce que hier soir, sur RFO-Guadeloupe, et par la bouche d’Elie Domota, fidèle à sa ligne de violence pateline à forte connotation raciste, des propos ont été proférés, à mon avis, violemment contraire au droit et à la morale.

A un moment le sieur Domota, sans doute assuré de l’impunité par la démission, dont il a l’habitude, de trop « d’autorités » légales, depuis qu’il a inauguré sa politique de force brutale et d’intimidation le 20 janvier dernier, s’est laissé aller à dire, que les dirigeants du Médef, et d’une façon générale ceux de toutes les associations patronales qui résistent à ses caprices et refusent ses oukases, n’auraient d’autre choix que de se soumettre ou « de quitter la Guadeloupe ». Mieux, (ou pire!), il a racialisé, son propos, comme il a l’habitude de le faire, et comme, de son point de vue (idéologique) , il aurait tort de ne pas le faire, puisque ses propos éructés à toute occasion, en présence parfois d’autorités légales (préfets, membres de l’administration, « autorités » politiques, etc), n’ont jamais fait l’objet de la moindre poursuite.

Elie Domota a proclamé devant des milliers de téléspectateurs, que devraient « partir » les « békés, et blancs créoles », qui ne sont pourtant pas les seules parties prenantes parmi ceux qui s’opposent à ce faux combat syndical, mais vrai combat politique, à l’idéologie sectaire, dévoyée, et raciste. ET Domota, s’est livré à des attaques nominatives, et violentes.

Or ces propos relève des tribunaux.

Nous sommes en France, monsieur le Procureur de la République, et ce n’est pas moi qui vous apprendrai l’existence des lois de 1881 sur la presse, complétées par les lois Pleven (en 1972) et Gayssot (1990).

L’article 1 de la loi Gayssot précise : « « L'Assemblée nationale et le Sénat ont délibéré,

L'Assemblée nationale a adopté,

Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit.

Article 1 -

Toute discrimination fondée sur l'appartenance ou la non appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion est interdite.

L'Etat assure le respect de ce principe dans le cadre des lois en vigueur. » (les passages soulignés le sont par l’auteur de cette lettre.

Il me semble, monsieur, que la désignation « béké, ou blanc créole », dans le propos sur lequel j’attire votre attention est constitutive du délit désigné par l’article 1 reproduit ci-dessus.

A une question du journaliste (une jeune femme visiblement inquiète de la tournure que prenait le propos de son redoutable voisin de table, -et qui ne l’eut été à sa place?), et qui tenta de calmer le jeu, M.Domota a invité les Guadeloupéens à boycotter les magasins des békés, des Hayot, des Le Métayers, etc , pour les contraindre à quitter « péyi an nou » (sic).

M. le Procureur, permettez moi de rappeler que « Constitue une discrimination toute distinction opérée entre les personnes physiques ou morales à raison de leur origine, de leur sexe, de leur situation de famille, de leur apparence physique, de leur patronyme, de leur état de santé, de leur handicap, de leurs moeurs, de leur orientation sexuelle, de leur âge, de leurs opinions politiques, de leurs activités syndicales...,de leur appartenance ou de leur non appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée.

Le Code pénal (articles 225-1 à 225-4 du nouveau Code pénal) punit les discriminations, lorsqu'elles consistent :

1 - à refuser la fourniture d'un bien ou d'un service ;

2 - à entraver l'exercice normal d'une activité économique quelconque; (souligné par moi).

3 - à refuser d'embaucher, à sanctionner ou à licencier une personne;

4 - à subordonner la fourniture d'un bien ou d'un service à une condition discriminatoire;

5 - à subordonner une offre d'emploi à une condition discriminatoire.
La répression des actes discriminatoires est aggravée, puisqu'ils sont punis au maximum de 2 ans d'emprisonnement et 30'000 F d'amende. »

Monsieur Jean-Michel Prêtre, Procureur de la République, je vous demande, au nom de la morale et du droit, je vous demande au nom de l’honneur Français et Guadeloupéen, je vous demande au nom de la paix civile, ce Bien si précieux, s’il n’est pas temps d’instrumenter contre les fauteurs de troubles matériel et moral dans ce département français de Guadeloupe.

Et plus précisément s’il n’est pas temps d’instrumenter contre les propos contraires à la loi, et de caractère raciste tenus par le sieur Domota.

Laisser faire davantage serait banaliser ce qui est un mal, banaliser ce qui fut le nerf d’une idéologie particulièrement criminelle au XXè siècle : le nazisme, qui se présenta lui aussi comme un pourfendeur de « pwofitasyon », comme un promoteur de pays humilié, et bafoué, comme victime lui aussi d’une « race » particulièrement abhorrée, soupçonnée de tous les crimes, la « race » juive, dont l’équivalent aujourd’hui dans la « Guadeloupe domotienne » ( une petite partie de la Guadeloupe, mais agissante, et exaltée) est le groupe des blancs créoles.

Il faut instrumenter. Qui intentera l’action publique? Ce ne sera pas M. Victorin Lurel, en tout cas, dont les contorsions serviles, hier soir, à l’égard du nouveau « seigneur », suscitaient la pitié.

S’il n’y a personne, je le ferai, moi.

Je tenterai d’être fidèle à ce que j’ai enseigné toute ma vie de professeur et de « philosophe ». Quand la Cité est menacée dans ses fondements, il importe que s’engagent, ceux qui refusent de laisser triompher la confusion des valeurs, la force brutale, les idéologies criminelles comme le racisme, dussent-ils se briser dans la lutte, mais dans l’honneur.

Mais j’ai bien conscience que mon initiative serait difficile. Je ne suis en effet qu’un citoyen ordinaire, un retraité de l’éducation nationale. Mes moyens financiers ne me permettraient pas une action vraiment efficace, à la hauteur de la grande cause défendue, et des enjeux capitaux en question.

Il y a pourtant bien d’autres personnes, associations ou institutions mieux placées, mieux outillées pour défendre le droit.

Je pense à ces professionnels de l’antiracisme, les « Ligue des droits de l’homme », les « Licra », les « SOS-Racisme », etc.

Je pense à ces légions de grands intellectuels (autoproclamés) si prolixes en « dits, », si avares en actions.

Pourtant, monsieur le Procureur de la République, il y a urgence à agir.

Je vous ai dit en quoi.

Je vous le dis, sûr d’exprimer la pensée profonde de très nombreux Guadeloupéens, de tous les milieux sociaux et ethniques.

Et je suis de ceux qui pensent que vous êtes le mieux placé pour agir au nom du droit.

Notre société n’est pas parfaite, elle est née, comme toute histoire, d’un entremêlement de choses bonnes et mauvaises.

Ce n’est pas du chauvinisme de ma part que de dire qu’elle n’est pas si mal que cela.

Est-il illégitime de ma part d’espérer de vous une action publique, non contre des « méchants », simple appréciation subjective (vraie ou fausse) de ma part, mais contre le délit avéré de racisme, en infraction avec les lois de la République, comme je crois l’avoir établi plus haut.

Dans l’espoir d’une action efficace de l’appareil de la justice républicaine, je vous prie de croire, monsieur le Procureur en l’expression de mes sincères salutations.

Edouard Boulogne.